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le film à l'envers

saison 02 photo 26

Seul face à soi-même

Limoges

PANASONIC Lumix DC-FZ82


Ciel de mai, bienveillant et limpide.

Cet après-midi, je suis là, seul. Une brise légère fait danser le feuillage vert tendre. J’inspire l'air cristallin et mon corps, qui ploie sous les ans et les cicatrices, retrouve l’espace d’un instant l’insouciante légèreté d’autrefois. Le soleil inonde la façade éblouissante qui se dresse devant moi. Ma vue se brouille et, tout à coup, défile devant moi le film à l’envers. Je repense à mon enfance, c'est comme si ça avait duré une seule soirée d'été, une soirée, infinie. Très longue, quand ça traine et que ça convient à tout le monde …que ça traine… comme ça.

Je me souviens très bien de tous ceux que la vie a désormais exilés. Ils restent à mes côtés, sur ce banc. Des sensations, des couleurs, des gens, mais pas des dates ! Mémoire fuyante, fugace et fragile. Je glisse ma main dans la poche de ma veste, et je frôle un carnet, le dernier ?

Au bout de 40 ans, t'as 40 carnets, et donc t'as 40 ans de vie. Nul ne peut savoir. Ça fait 40 ans presque, c'est ça ? Ça donne quand même le panorama d'une vie. Enfin, c’est quoi une vie? Qu'est-ce qu'on a fait dans une vie ?

Sur un fil, j’ai tissé ma vie, j’ai tissé des liens. Le fil souvent s’est rompu et je n’y peux rien ou presque. Je me souviens des soirs où je me retrouvais avec Marie-Louise ou Jeannine ou Jules. Et puis, ils me chantaient des chansons que je ne connaissais pas ; mes parents n'écoutaient que de la musique classique donc ils me chantaient des chansons de Tino Rossi ou de... Que je trouvais jolies.

Quelque chose un jour s'est passé. J'ai perdu mes parents assez jeunes. J'ai tellement pleuré. Et je crois, et depuis, je crois qu'en fait, du coup, dans la vie, j’ai vraiment cherché à me créer une famille.

Chaque jour, loin de moi, pourtant. Je les entends. J'entends leurs pas dans l'escalier. Mes enfants, c'est mon bonheur. Hier, ils étaient là, près de moi, comme par le passé. A rire, à rêver, à espérer, à s’indigner. Je respire encore cet air léger mais déjà un peu frisquet. Je me dresse, lentement, prenant appui sur ma canne. Peut-être reviendrais-je ici, demain, un jour… Peut-être.


Mon texte s' inspire d'une chanson : PANORAMA Paroles de Vincent DELERM Musique de Vincent DELERM © LILI LOUISE MUSIQUE - 2019


Ma photo, quant à elle, est inspirée d'un cliché de mon ami photographe, Clément DESCUBES pour lequel j'avais écrit ce texte, naguère.




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© Daniel Hugues, photographies
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